L’obtention d’un passeport en Haïti exige des efforts surhumains en dépit des annonces faites par le président Jovenel Moïse, le 30 mars dernier. Les services de production et de livraison de ce document de voyage demeurent compliqués et cela fait l’affaire des racketteurs qui continuent d’imposer leur loi.
«O btenez votre passeport dans un délai de cinq jours » : déclaration du président de la République au Centre de Réception et de Livraison de Document d’Identité (CRLDI), à Tabarre, fin mars. Cette intervention n’a encore pas été suivie d’actes concrets. Plus de deux mois après, des demandeurs dénoncent le mauvais fonctionnement des services de production et de livraison des passeports. «J’ai déposé les pièces exigées au lendemain de l’intervention du président, à date rien n’a encore été fait…», se désole Jean Pierre qui en est à son dixième rendez-vous, sans compter les multiples dépenses effectuées. En effet, les prix du passeport varient en fonction des couloirs empruntés à l’Immigration ou dans un CRLDI occupés en permanence par des racketteurs, couramment appelé « démachè ».
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Au bureau de l’immigration
Deux types de frais sont pris en compte lors de l’émission du passeport ; les frais des pièces exigées et les frais de service. Parmi ces documents on retrouve : la carte d’identification nationale (CIN) jusqu’ici gratuite, le matricule fiscal (300 gourdes), l’extrait des archives (700 gourdes), le droit de passeport, un papier timbré, (1 600 gourdes), deux photos d’identité pour compléter le dossier (400 gourdes). Des frais de service supplémentaires de 500 gourdes, un prix fixé par le bureau de l’immigration pour l’option
« extrême urgence ». Cette extrême urgence, qui en principe devrait durer entre 3 et 15 jours, excède bien souvent 3 mois. Ceci explique le découragement des demandeurs obligés d’aller vers les rançonneurs. En faisant la somme des dépenses effectuées, on se rend compte que le passeport peut coûter environ 3 500 gourdes à travers les circuits réguliers.
Dans une agence
Les agences sont sur le marché depuis bien des temps et servent d’intermédiaires entre le bureau de l’immigration et la population. Le demandeur qui décide d’utiliser les services d’une structure du genre doit fournir les mêmes pièces à savoir : une carte d’identité nationale (CIN), un matricule fiscal, un extrait des archives, un droit de passeport, deux photos et les frais exigés. Malgré l’existence d’une association des agences, ces dernières ne pratiquent pas une politique commune en matière de fixation des montants à verser pour l’obtention du passeport. À l’agence Rapide Travel Service, située juste à côté de l’immigration, les prix varient. En plus des 3 000 gourdes que coûtent les pièces, le barème est fixé à 2 750 gourdes et la livraison du document se fera probablement au bout de deux mois et demi. En cas d’extrême urgence, l’intéressé doit verser 11 250 gourdes et aura son passeport en deux semaines environ. Bob Travel Agency, une autre agence située non loin de la précédente, dispose aussi de plusieurs options. Le PDG Emile Présandieu reclame 3 000 gourdes de frais pour l’obtention du passeport en quatre mois, 5 000 gourdes pour l’obtenir en trois mois, 7 500 gourdes pour deux mois, 10 000 gourdes pour un mois, 15 000 gourdes pour 15 jours.
Considérant la variabilité des prix et la qualité des services, il est évident qu’on est loin d’avoir un service de passeport unique. Les demandeurs, ignorant les risques que représentent les détours, répètent que « Tout chemin mène à Rome ». Mais ils semblent oublier que le prix du trajet n’est pas le même pour y arriver.
Marc Evens Lebrun