Santé : Mieux prendre en charge les tout-petits

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LE TAUX DE MORTALITÉ chez les nourrissons a baissé de 52 % entre 1990 et 2012 en Haïti. Georges H. Rouzier / Challenges

Tout petit, tout fragile. Le nouveau-né exige un encadrement médical adéquat pour prévenir entre autres les infections respiratoires aiguës et les maladies diarrhéiques, principales causes de décès chez les nourrissons en Haïti. Les parents ont évidemment aussi un rôle fondamental à jouer.

Les efforts consentis par le ministère de la Santé publique et de la Population (MSPP), avec l’appui de ses partenaires internationaux, ont permis de faire chuter considérablement le taux de mortalité chez les nourrissons (0-12 mois) ces dernières années. En effet, selon les statistiques officielles, ce taux est passé de 122 à 59 pour 1 000 naissances vivantes, entre 1990 et 2012, soit une baisse de 52 %. L’objectif de le réduire en 2015 à 34 pour 1 000 naissances vivantes n’a pas été atteint puisque la statistique évolue autour de 57 pour 1 000. Les progrès sont beaucoup plus lents dans la catégorie des moins de cinq ans. Selon les chiffres publiés par la Banque mondiale, le taux est de 69 pour 1000 naissances vivantes en 2015 alors qu’il était estimé à 71 en 2014.

Le MSPP, des agences internationales œuvrant dans le domaine de la santé, les regroupements associatifs de médecins dont la Société haïtienne de Pédiatrie, se rendent comptent qu’il faut redoubler d’efforts, d’autant que, par rapport à l’instabilité politique et à la crise économique du pays, les infrastructures sanitaires se détériorent ainsi que l’environnement du pays en général. L’on ne peut minimiser les impacts de ces situations sur le bien-être des nourrissons si vulnérables, aux microbes notamment. Il est prouvé, chiffres à l’appui, que les infections respiratoires aiguës (IRA) qui peuvent déboucher sur une pneumonie grave, sont la principale cause de décès chez les nouveaux nés (environ 18,1 % selon l’OMS). Arrivent en deuxième position, les maladies diarrhéiques qui ont pour conséquence la déshydratation. A ajouter aussi, la malnutrition responsable dans la majorité des cas de l’affaiblissement du système immunitaire des enfants de moins d’un an.

LE NOMBRE DE PÉDIATRES en Haïti est estimé à environ 350.
LE NOMBRE DE PÉDIATRES
en Haïti est estimé à environ 350.

Le rôle essentiel du pédiatre
Partout ailleurs, l’encadrement médical, surtout en ce qui concerne des enfants (0-18 mois), est plus que nécessaire. Il s’agit, répète le docteur Jacques Alain Pelletier, directeur exécutif de la Société haïtienne de Pédiatrie (SHP), de prévenir des infections respiratoires aiguës ou des maladies diarrhéiques. Dans un sens plus large, le pédiatre est l’interlocuteur privilégié auprès des familles. Il peut exercer en libéral, à l’hôpital, dans les services médico-sociaux. De la néonatalogie au suivi du développement physiologique des enfants, le pédiatre joue donc un rôle essentiel. La pédiatrie, une discipline médicale qui s’attache à étudier le développement de l’enfant et les maladies susceptibles d’y être associées, est censée être pratiquée de la même façon dans le monde entier. En Haïti, bien des efforts sont consentis pour offrir des services pédiatriques de qualité en termes d’acquisition de matériels médicaux et de ressources humaines, si l’on en croit le Dr Pelletier. « La Société haïtienne de Pédiatrie a été justement créée pour aider à la formation continue des pédiatres haïtiens pour qu’ils puissent faire face aux nouveaux défis qui se présentent, explique-t-il. La SHP a été fondée en 1976 pour aider ceux qui n’ont pas les moyens de payer les frais médicaux. » Cette association à but non lucratif a, par exemple, organisé le 18 mai dernier des consultations et distributions de médicaments gratuites au bénéfice d’un nombre important d’enfants en situation de précarité à Cavaillon (Sud), Petit-Goâve (région des Palmes) et à Laboule (Ouest).

JACQUES ALAIN PELLETIER, directeur exécutif de la Société haïtienne de Pédiatrie.
JACQUES ALAIN PELLETIER, directeur exécutif de la Société haïtienne de Pédiatrie.

La population doit être éduquée
« Assez souvent, des parents préfèrent consulter des hougans et dépenser une fortune ou encore invoquer la Vierge Marie pendant des jours au lieu de confier leurs progénitures à des pédiatres », déplore Jacques Alain Pelletier, pour qui ce genre de comportement met en danger la vie des enfants dont l’état de santé peut s’aggraver par manque de soins appropriés. Selon le directeur exécutif de la SHP, l’argent n’est pas le premier facteur du manque de fréquentation des cliniques, le problème est fondamentalement culturel. Pour tenter de le juguler, la Société haïtienne de Pédiatrie diffuse sur les ondes de plusieurs stations de radio et de télévision des spots de sensibilisation sur la pneumonie et l’importance de la prise en charge médicale des nouveau-nés. « Malheureusement certaines connaissances erronées véhiculées par nos grands-parents persistent et poussent à de mauvaises décisions », souligne le spécialiste haïtien rejetant, par exemple, l’information selon laquelle « les premières dents et la salive du bébé provoquent de la diarrhée ».

La SHP regroupe 300 membres dont une centaine participent activement aux activités de l’association. Pour l’ensemble du pays, les pédiatres haïtiens n’excéderaient pas le nombre de 350 mais ils arrivent, tant bien que mal, à prendre en charge des milliers de nouveau-nés.

Cossy Roosevelt