Suite aux troubles sociaux ayant affecté le pays les 6 et 7 juillet 2018, des graffeurs internationaux ont foulé le sol haïtien pour partager, à leur manière, des messages de solidarité. Dans le cadre de cette initiative, les artistes canadiens Bryan Beyung et Thomas Dalemans, ainsi que nos talentueux haïtiens Jerry, Snoopy, Gary et Rayza et les cracheurs de feu ont illuminé la rue Toussaint Louverture à Pétion-ville.
C’est d’abord à la rue Toussaint Louverture, à Pétion-Ville, que se sont rassemblés le 14 juillet des dizaines de curieux pour assister à la réalisation d’une fresque murale en face de Best Western Premier. Ce luxueux hôtel 4 étoiles a fait l’objet d’attaques de manifestants violents qui ont incendié pas moins de cinq voitures lors des émeutes provoquées par la hausse des tarifs des carburants. L’exercice réalisé par ces graffeurs permet d’établir une véritable relation entre les formes d’expression artistiques urbaines auxquelles l’évènement donne place et le grand public, tout âge confondu, qui prend plaisir à découvrir une œuvre positive.
« Nous voulions dégager de l’énergie positive après ce qui s’est passé devant l’hôtel, afin de montrer au monde qu’il n’y a pas que de la négativité chez nous contrairement aux images véhiculées dans les médias et sur les réseaux sociaux », indique l’artiste Jerry. Accompagnant les graffeurs haïtiens, Bryan Beyung, lui-même graffeur de renommée mondiale, Thomas Dalemans qui est à sa deuxième visite en Haïti, le réalisateur Jérémie Rubier, venu du Japon, ont tous prévu de se produire dans le cadre de la 3e édition du Festival International des Arts Urbains de Port-au-Prince, « Festi-graffiti », organisé chaque année par le Collectif pour la Promotion des Arts Urbains et de l’Art Contemporain (CPAUAC).

Cette grande manifestation du street art qui devait avoir lieu en juillet dernier juillet dernier a été reportée au mois de septembre (du 12 au 21) avec pour thème : « Réinventer l’espace public ». Malgré le report du festival, indique Aly Acacia, initiateur de l’évènement, les artistes ont quand même choisi de venir au pays à un moment aussi critique. « Ils voulaient ainsi nous insuffler ce nouvel air dont nous avions tant besoin, envoyer un message d’espoir, d’amour et de paix… redonner vie à l’espace public ». Comment ne pas remercier Xavier Laloux et Akim Acacia qui ont organisé des levées de fonds à Montréal pour financer l’achat de sprays de peintures et les billets d’avion de ces artistes qui ne se sont pas laissés intimider par l’instabilité politique du pays, poursuit Aly Acacia. « Je suis venu en Haïti avec un sentiment mitigé, confie Bryan Beyung. Je craignais les manifestations et l’ouragan Beryl qui se dirigeait vers Haïti, mais j’avais des sources dans le pays qui me disaient que la tension s’était calmée et je voulais voir de près comment la situation évoluait.

Alors j’ai amené du positivisme et un peu de mon talent », dit-il, tout sourire. L’événement s’est également ouvert aux prouesses des jongleurs et des cracheurs de feu qui ont littéralement plongé les spectateurs dans une ambiance magique et mystérieuse. Les graffeurs, pour leur part, ont produit des œuvres d’une grande imagination véhiculant des messages d’amour et de paix pour Haïti. « Il y a peu, Pétion-Ville s’enflammait. Aujourd’hui, nous avons réchauffé les cœurs, soufflé un vent d’espoir et rafraîchi un quotidien », jubile l’artiste Xavier Laloux, soulignant que l’aventure n’est pas terminée. D’autres épisodes suivront en novembre 2018 pour célébrer le 320ème anniversaire de fondation de la ville de Jacmel et les 215 ans de la Bataille de Vertières.
Aljany N. Zephirin