CETTE PHOTO, vous ne le croirez pas, a été prise le jour où des centaines de personnes, pompiers inclus, ont dû assister, impuissants, à l’irrésistible consomption de biens représentant toute une vie de travail. Quand ce n’est pas la vie elle-même, telle qu’elle se manifeste dans notre propre dimension cosmique, qui est anéantie. L’incendie qui, dans la matinée du lundi 4 avril, a détruit plusieurs maisons à Pétion-Ville, n’a pas tué.
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À Hinche, par contre, quelques jours plus tôt, il fut assez meurtrier : 7 personnes carbonisées. La photo, il n’y a pas à dire, est magnifique. On y voit une âme de bonne volonté aider à circonscrire le feu avec un seau d’eau. Un geste insignifiant, peut-être, face à la démesure du sinistre, mais tellement grandiose par le sentiment qui l’habite… Je ne dénigrerai pas les miens en constatant ce que le cliché nous raconte en filigrane. Entre la construction des casernes de pompiers dignes de ce nom dans nos centres urbains et les dépenses somptuaires, improductives, qui ont contribué au déficit budgétaire et au maniement de la planche à billets, nos dirigeants n’ont pas toujours eu un choix heureux. Je préfère me livrer à la magie de ce tableau, de ce bleu éthéré et dégradé qui précède les profondeurs abyssales et que le photographe a su capter au moment précis où l’eau étalait ses plus belles molécules. Nos rapports au feu sont d’un genre assez particulier dans un pays où le bien et le moins bien sont assez mitoyens. Que nous reste-t-il après le passage du feu ? Les cendres, ces promesses d’une nouvelle résilience. Tel le phénix, nous renaissons toujours de nos cendres.
Henri Alphonse